« Vous êtes 10 fois plus intelligent que vous ne l’imaginez »

Christophe Bourgois-Costantini , aux éditions First

Christophe Bourgois-Costantini est un touche- à-tout. À 40 ans, il a changé radicalement de vie pour exploiter tous ses talents. Ingénieur et chef d’entreprise, il s’est mis à écrire des polars et à jouer du saxophone. Il accompagne désormais de nombreux sportifs et entrepreneurs pour booster leur carrière en tant qu’executive coach HEC et conférencier. Passionné par l’intelligence multiple, il a interrogé plus de 150 champions du sport, de la culture ou de l’entreprise pour les faire témoigner dans son livre « Vous êtes 10 fois plus intelligent que vous ne l’imaginez » aux éditions First. Nourri par le travail d’Howard Gardner et fort de ses nombreuses rencontres, il a développé le concept d’intelligence du temps. Rencontre avec un érudit du développement personnel, un homme accompli aux multiples facettes.

Comment vous est venue l’envie de travailler sur l’intelligence multiple ?

Quand j’ai vendu ma société, j’ai réalisé des études de coaching. J’ai fait de L’intelligence multiple d’Howard Gardner mon sujet de mémoire. Puis, je me suis mis à enquêter sur plus de 150 personnalités pour écrire mon livre sur ce sujet : j’ai étudié une multitude de cas comme ceux de Sœur Emmanuelle ou Steve Jobs, puis j’ai rencontré des grands champions du monde de l’entreprise, du sport ou de la culture. Les personnes les plus brillantes avec lesquelles j’ai eu la chance d’échanger utilisent au minimum six intelligences différentes. Au fil du temps, elles se sont mises à développer des capacités très éloignées de leur cœur de métier.

Comment avez-vous expérimenté l’intelligence multiple dans votre vie ?

Comme de nombreuses personnes en France, j’ai fait des études d’ingénieur aux forceps. L’intelligence logico- mathématique n’était pas mon fort. Il a fallu que je fasse une dépression à 40 ans pour entamer une véritable catharsis. C’est comme si j’avais reprogrammé mon cerveau en appuyant sur la touche reset. J’ai découvert que j’avais beaucoup plus d’aptitudes que je ne l’imaginais : je me suis mis à écrire des polars, je suis devenu coach puis conférencier à HEC et je viens d’écrire un livre de développement personnel qui fonctionne très bien. Pour quelqu’un qui plafonnait à 4 en français et philo, c’était inimaginable… Aujourd’hui, je suis dans le lâcher-prise. J’ai acquis une certaine justesse de vie.

Quelles sont vos différentes intelligences et comment les utilisez-vous au quotidien ?

À l’origine, j’avais une intelligence spatiale et relationnelle très développée. Puis, j’ai débloqué mon intelligence verbo-linguistique en écrivant. Enfin, j’ai joué du saxophone pour assouvir ma passion du jazz. J’ai alors découvert être doué d’une intelligence du son que j’ignorais. À partir de là, tous mes canaux se sont ouverts et mes intelligences se sont mises à se nourrir entre elles. Par exemple, quand vous cuisinez, vous faites interagir différentes facultés kinesthésiques, spatiales, temporelles et même la sacro-sainte logico-mathématique. Mais le plus important, c’est que toutes ces intelligences nourrissent mon « Qui suis-je ? ». Jusqu’à 40 ans, je ne savais pas qui j’étais.

Qu’est-ce que vous a apporté cette connaissance de vous-même ?

J’ai compris que la personne la plus importante pour moi, c’était moi. Il faut être aligné, ancré, suivre ses intuitions, être dans le lâcher-prise et l’ici et maintenant. Aujourd’hui je suis dans le qualitatif, plus dans le quantitatif. J’ai laissé tomber mon masque il y a bien longtemps.

Est-ce judicieux de booster des intelligences pour lesquelles nous n’avons aucune prédisposition ?

Quand on touche à l’intelligence multiple, on a souvent des surprises. Parfois, on se croit nul car on a eu de mauvaises expériences, mais on se trompe. L’important, c’est de ne pas se forcer à faire des choses qui nous déplaisent et de ne rien attendre quand on tente une nouvelle expérience. Ouvrez les canaux et vous verrez ce qu’il en ressort. C’est une question de disponibilité, d’être en osmose avec le monde, d’avoir les yeux grands ouverts. Revoyez-vous enfant et demandez-vous quels étaient vos drivers, ce qui vous faisait réellement vibrer à l’époque. Redescendez dans votre corps et demandez-vous qui vous êtes.

Y a-t-il des intelligences qui marchent en duo ?

Dans le sport, l’intelligence kinesthésique fonctionne souvent de pair avec celle du son. Mais il y en a d’autres : l’intelligence du « qui suis-je ? » avec celle du temps et l’intelligence naturaliste avec celle de la spiritualité.

Comment les managers et chefs d’entreprise peuvent-ils utiliser de façon simple l’intelligence multiple et l’intelligence collective dans le cadre professionnel ?

Il faut que les dirigeants s’intéressent à l’humain. Au-delà du respect qui doit guider le management, ils doivent avoir une vraie curiosité pour l’autre. C’est en échangeant sur les passions de chacun qu’ils pourront tirer le meilleur de leurs équipes. La bienveillance doit être bien entendu de mise dans tous les cas. Les intelligences multiples facilitent la cohabitation au sein des entreprises.

Vous avez créé la notion d’intelligence du temps. Comment a germé cette idée ?

En échangeant avec Thierry Marx et François Pinault. Le temps n’est absolument pas linéaire et on a tous tendance à confondre vitesse et per- formance. Il faut apprendre à perdre du temps avec élégance, l’apprivoiser pour éviter d’être dans l’instantanéité. Il faut à la fois s’offrir des moments de réflexion et apprendre à profiter de l’instant présent.

Comment expliquez-vous le retard de la France en termes d’intelligences ?

La France souffre d’un système figé. On aime mettre les gens dans des cases. On envie le modèle scolaire danois et finlandais, mais ces pays acceptent tous les profils d’intelligences dès la maternelle. Dans l’Hexagone, on préfère les spécialistes, faciles à identifier, car on a peur de l’inconnu.

Pour votre livre, vous avez rencontré de nombreuses personnalités. Qui vous a le plus impressionné et pourquoi ?

Thierry Marx pour sa connexion à lui-même ; Rafael Nadal et François Pinault pour leurs clairvoyances ; Marinette Pichon pour son parcours de vie exceptionnel. Lors de chaque interview, il y avait une révélation, un « oui, mais bien sûr, cette intelligence vient de là ! » Quand François Pinault vous explique que sa passion pour l’art contemporain vient des planches qu’il rangeait pour son père, c’est un véritable cadeau. J’ai également adoré la révélation de Claude Lelouch : « Il vaut mieux être moyen partout plutôt que très bon quelque part. »

Quelles sont les trois clés de votre livre dont vous êtes le plus fier ?

« C’est celui qui dit qui est. » La question essentielle, c’est : qu’est-ce que je vois chez l’autre que je n’aime pas chez moi ? On devrait remercier les gens qui nous agacent de nous montrer le chemin de ce qui nous reste à parcourir. Mon livre sur l’intelligence multiple vous permet de devenir l’aventurier de vous-même sur le long terme. Dernier point : les intelligences ne sont pas réservées à une élite ; elles sont accessibles à tous. C’est une philosophie : elles vous éloignent du romantisme intérieur et vous permettent de trouver votre grand style. Je suis plus Telos que Skopos. Réussir son geste est plus important que d’atteindre sa cible. Il ne faut pas « réussir dans la vie », mais « réussir sa vie ».

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