À l’opposé du culte de la performance et de la course à l’orgasme, le slow sex nous invite à ralentir nos ébats, à être davantage présent à l’autre et à remobiliser nos sens. Principes et mode d’emploi.
Confinement oblige, la notion de temps semble s’être effacée. Nous nous sommes mis, sans nous en rendre compte, à la slow attitude. En deux mois, nous en avons oublié notre voiture au garage, nous avons réinvesti notre sweet home, ressorti les recettes de nos grand-mères, joué aux jeux de société avec nos minots et pris du temps pour retisser du lien avec nos amis et les membres éloignés de notre famille. Et si nous profitions de ces vacances pour explorer une nouvelle dimension de cette slow life pleine de surprises qui nous a été imposée au printemps 2020 ?
Le slow sexe s’oppose aux concepts de performance sexuelle ou de porno maison. À force de chercher des sensations toujours plus fortes, on pourrait finir par ressembler à des robots sexuels aux réactions prévisibles. Inspiré par le travail de Diana Richardson, spécialiste de l’approche tantrique, Anne et Jean-François Descombes nous invitent, dans leur livre Le Slow Sex, à s’aimer en pleine conscience, à revisiter notre sexualité en douceur pour recouvrer l’intimité. Les deux auteurs s’appuient sur des principes essentiels : prendre son temps, renouer avec sa nature profonde, être plus attentif à soi et à l’autre, se concentrer sur ses ressentis plutôt que sur l’orgasme. Fini les jeux olympiques du sexe, on passe en mode slow pour vivre à 100 % l’instant présent !
Le couple d’auteurs nous propose de revenir au corps vu de l’intérieur et de laisser parler notre peau plutôt que notre cerveau. En Occident, notre éducation orientée vers le mental nous éloignerait du présent. En cherchant l’orgasme à tout prix avec une notion de performance, nous nous concentrons trop sur les actes et pas assez sur le toucher, les sensations. En outre, cela met la pression sur notre partenaire en lui donnant l’impression d’être traité comme un objet sexuel. En considérant l’acte sexuel comme une séance de relaxation, vous laissez de l’espace à la complicité, à la tendresse et aux sentiments. En se détournant de la recherche d’excitation à tout prix, vous vous libérerez des contraintes et vous découvrirez des zones érogènes dont vous ne soupçonniez pas l’existence.
Dans le tantra, les énergies masculines et féminines sont des forces égales, mais opposées. Elles s’attirent et se complètent comme le yin et le yang. L’homme est une force d’émission et la femme est une force de réception. En occident, c’est l’homme qui est valorisé pour sa force créatrice. Le vagin n’est pas reconnu à proprement dit pour sa puissance d’accueil et d’hospitalité. Pour redonner de la puissance aux femmes et vivre une expérience extatique, il faut considérer la pénétration comme une unité biomécanique avec un pénis, pôle émetteur positif, et un vagin, pôle émetteur négatif. S’opérant à partir d’un pôle dynamique, l’énergie sexuelle des hommes est plus facilement et plus rapidement mobilisable. Chez les femmes, le pôle dynamique serait situé au niveau de ses seins et plus particulièrement des mamelons. Quand la femme place son esprit dans le volume de ses seins, son énergie sexuelle s’éveille et son vagin s’ouvre. Les femmes ont tendance à considérer leur besoin de plus de temps pour se sentir prêtes à la pénétration comme un défaut de fabrication alors que c’est juste une facette de leur métabolisme. « Quand l’homme est présent dans son pénis et que la femme est ouverte dans son vagin, l’énergie de l’homme est accueillie. Alors, il peut avoir l’impression qu’elle se diffuse jusqu’à atteindre le cœur de la femme. En retour, la femme peut laisser tout son amour rayonner de sa poitrine vers le cœur de l’homme », considèrent les auteurs. Ce qui serait la formule magique pour atteindre l’extase…
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Réinviter sa façon de faire l’amour exige un brin de préparation, une bonne dose d’humour, ainsi que beaucoup de prévenance et d’attention.
Pour pratiquer le slow sexe, coupez votre téléphone et assurez-vous que vous ne serez pas dérangés par vos enfants, votre animal de compagnie ou vos parents. Une lumière d’ambiance diffusée par des bougies et une musique douce peuvent faire des miracles et vous inciter à la relaxation. Avoir l’impression d’être dans un cocon peut favoriser l’intimité. Vous pouvez également prendre un bain ensemble pour vous mettre en condition en douceur. Seule contrainte : que votre baignoire soit suffisamment grande…
Le toucher est la voie royale de la sensualité. Si l’intention de ressentir est dans la caresse, votre attention peut être mobilisée et vous pouvez être réactive. A contrario, si la caresse est mécanique, vous risquez de vous agacer rapidement. Faites des pauses pour prendre conscience de vos ressentis mutuels et écouter la respiration de votre partenaire. Cette dernière est révélatrice de sa présence à l’autre, mais aussi de son niveau de relaxation. Encore une fois, ne touchez pas par intention d’exciter, mais pour observer la sensibilité du corps de l’autre.
Dans l’acte sexuel conventionnel, les mouvements sont rapides et mécaniques dans le but d’atteindre l’orgasme. Tous les muscles sont crispés, montrant que l’on fournit un véritable effort. Dans le slow sexe, les mouvements sont doux pour être présent à soi et à l’autre, dans le but d’explorer sa sensualité. Des moments de pause sont nécessaires pour apprécier pleinement sa volupté. Il s’agit de se laisser guider par ce que l’on ressent à l’intérieur du corps.
Apprendre à parler du moment présent pendant l’amour permet de nous ancrer en nous-même, tout en partageant nos ressentis avec notre partenaire. Vous pourrez ainsi guider l’autre avec sensibilité pendant l’acte sans rentrer dans un jeu des devinettes. La seule règle est de communiquer avec bienveillance, sans reproche, ni agacement. C’est important car s’ouvrir à l’autre, c’est se rendre vulnérable. En outre, quand vous éprouvez une douleur ou un inconfort, parlez-en immédiatement, mais toujours en douceur pour ne pas heurter l’autre. A contrario, quand vous exprimez une sensation délicieuse, vous créez une résonance, une amplification du plaisir.
Le désir sexuel passe par le regard. Il aiderait à se maintenir dans la présence à soi et à son partenaire. En fermant les yeux, vous risquez de partir dans l’imaginaire, le mental et de vous éloigner de la réalité. Il faut apprendre à regarder l’autre sans perdre de vue ses ressentis. En outre, par le regard, nous partageons avec l’autre qui nous sommes à l’instant T sans masque, ni artifices. D’ailleurs, les yeux ne sont-ils pas le miroir de l’âme ? Les yeux dans les yeux, vous éprouverez un sentiment d’union intense.
Une respiration lente et profonde aiderait à développer plus de vigilance pendant l’acte sexuel. Il faut laisser l’air entrer et descendre vers le plancher pelvien. D’après Anne et Jean-François Descombes, il s’agit de suivre consciemment le parcours de l’air comme s’il venait masser de l’intérieur les organes génitaux. Détente et respiration sont intimement liées. En relâchant les tensions musculaires, le corps répond instinctivement par une grande inspiration, comme si un espace intérieur s’ouvrait.
L’odorat est le sens qui nous relie le plus à notre animalité. Il a le pouvoir de nous rappeler des souvenirs, de générer du plaisir ou du dégoût, c’est un lien essentiel dans votre vie de couple. L’observation des odeurs et ses variations subtiles nous offre de précieux indicateurs sur notre état et sur celui de notre partenaire. Donc méfiez-vous des cosmétiques dont les molécules chimiques brouillent les odeurs naturelles et les messages transmis par les phéromones. Privilégiez les huiles essentielles et les parfums naturels.
Quand on veut changer ses habitudes sexuelles, mieux vaut faire preuve d’une bonne dose d’humour. Vous allez forcément vous retrouver dans des positions incongrues et des situations improbables, et les fous rires sous la couette feront certainement partie du programme. Le rire renforce la complicité et l’intimité. Il faut aborder le slow sexe comme un jeu et ne pas se prendre trop au sérieux. Être léger, indulgent et pratiquer l’autodérision si le cœur vous en dit.
TOO#39