Lire la première partie de notre article
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, le sisu n’est pas une bataille solitaire, car dans les moments difficiles, il faut pouvoir se confier et se sentir soutenu, ce qui renforce les liens avec autrui et crée un cercle vertueux de soutiens réciproques. En famille ou dans la sphère professionnelle, les Finlandais ont l’habitude de rechercher collectivement des solutions aux problèmes. En revanche, ils apprennent dès l’enfance n’a rien à dire. Pour eux, une bonne communication doit être impartiale, directe, sincère et surtout pas verbeuse. Leur modus vivendi ? Travailler dur, parler peu et récompenser la loyauté́ pour pouvoir se fier aux apparences. Dans le monde de l’entreprise, on privilégie toujours l’efficacité́ au consensus avec des managers qui savent trancher les décisions. Très à cheval sur l’équité, 75 % de la main-d’œuvre est syndiquée. Mais rares sont les conflits qui vont jusqu’aux tribunaux. Réputés fins négociateurs, les Finlandais ont d’ailleurs joué un rôle majeur dans les pourparlers de paix en Irlande du nord, dans les Balkans et au Caucase. Parallèlement ultra-solidaire, 90 % de la population fait du bénévolat dans l’une des 70000 associations que compte le pays.
En matière d’égalité́ des sexes, les Finlandais ont été les premiers à accorder le droit de vote aux femmes, en 1906. Pour pratiquer le franc-parler finlandais, rien de plus simple : soyez direct en communiquant sur vos objectifs mais avec tact. N’hésitez pas à parler de vos préoccupations dès le début de la conversation, mais pratiquez l’écoute active et laissez l’autre exprimer sa pensée. Traitez votre interlocuteur comme votre égal, même si vous avez une position hiérarchique supérieure. Enfin, pesez le pour et le contre, acceptez les silences pour rester intègre et sincère en toutes circonstances. Les Finlandais n’ont qu’une parole et exècrent la manipulation, les bras-de-fer, le vedettariat et le sentimentalisme. Règle numéro 1 de la négociation finlandaise : garder la tête froide du début à la fin. Dans la sphère privée et surtout dans le cadre du mariage, la communication est basée sur le respect. Ce n’est pas parce qu’on est contrarié, qu’on a le droit de déverser des inepties. La répartition des tâches (en tenant compte des compétences de chacun) s’inscrit au cœur du fonctionnement du couple. L’interdépendance est aussi de mise pour que chacun puisse s’épanouir dans des activités qui lui plaisent. En cas de crise, il faut être flexible, encaisser les coups durs et éviter la comptabilité́. Comme l’explique l’auteure, il faut apprendre l’art de la dispute loyale qui consiste à exprimer son point de vue tout en respectant son interlocuteur.
Les parents finlandais, plus que les autres, prônent l’autonomie et la joie plutôt que la surprotection. Ils valorisent les attitudes fonceuses en invitant leurs enfants à relever des défis et à sortir de leur zone de confort. Exit les compliments vides de sens, ils encouragent l’audace, le courage et la ténacité. Les Finlandais aiment les louanges réalistes, l’apprentissage par l’erreur, le plaisir de l’inconfort (se baigner dans l’eau froide ou se promener sous la pluie bien couvert). En outre, pour booster l’estime de soi de leurs bambins, leur donner le sens des responsabilités et de la valeur travail, les parents finlandais leur confient des tâches ménagères. Plus tôt l’enfant sera habitué à donner un coup de main, plus vite il l’intégrera comme une seconde nature. Le climat joue également un rôle prépondérant dans l’apprentissage du sisu car même s’il fait froid, les activités extérieures sont revigorantes.
En termes scolaires, l’école commence tout en douceur à partir de 7 ans avec 5 heures de cours par jour. Pourtant, l’enquête sur les acquis des élèves de primaire menée par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) montre que la Finlande obtient de bien meilleurs résultats scolaires que la plupart des pays aux programmes surchargés. Par ailleurs, tous les enfants fréquentent les écoles de leur quartier. Les établissements privés ne sont pas « meilleurs » que les écoles publiques car les enseignants sont tenus en haute estime et tous bien rémunérés. Les bons élèves sont aussi traités de la même façon que ceux qui ont des difficultés pour ne laisser aucun enfant de côté. Quand un élève décroche, il bénéficie d’un tutorat individuel ou d’un assistant pédagogique. Il existe aussi, dans chaque établissement, un professeur référent formé aux troubles de l’apprentissage. L’Éducation nationale finlandaise encourage aussi les professeurs à explorer des méthodes pédagogiques qui correspondent à leur personnalité. Les élèves apprennent dès leur plus jeune âge à veiller sur leur prochain en protégeant ceux qui ne savent pas se défendre. On apprend aux enfants à penser par eux-mêmes avec une certaine indépendance d’esprit. 90 % des écoles finlandaises ont mis en place le programme Kiva qui lutte contre l’intimidation à l’école. Basé sur des décennies d’analyses récoltées dans les écoles, ce programme est si efficace qu’il a même été adopté par d’autres pays. Enfin, la loi considère que la violence engendre la violence et interdit les châtiments corporels. Cela sous-tend l’idée que si vous traitez l’autre avec intégrité, il en fera de même. Les Finlandais, comme les Français, bénéficient d’un filet de sécurité sociale universel en cas de maladie ou sont protégés lorsqu’ils perdent leur emploi. L’éducation y est aussi totalement gratuite.
Les Finlandais sont particulièrement fans de ski de fond, de courses sur de longues distances et de hockey. C’est également des grands supporters de Formule 1. Plus l’endurance du sportif est éprouvée, plus le sport est valorisé. D’après Joanna Nylund, le sport libère aussi la population d’émotions généralement bien enfouies. Pour pratiquer leur sport favori, les Finlandais, quel que soit leur niveau, se fixent des objectifs réalistes et n’hésitent pas à découper leur programme en plusieurs sessions. Pour eux, la planification est essentielle. Si votre objectif est de courir 10 km, débutez par 3 km, puis faites 1 km de plus chaque semaine. Les Finlandais ont pris l’habitude de bouger dès qu’ils en ont l’occasion : pour aller au travail, faire leurs courses ou emmener les enfants à l’école. Il a même été proposé récemment que les personnes qui se rendent au travail en vélo bénéficient des mêmes avantages fiscaux que ceux qui s’y rendent en voiture. Décidément, le modèle finlandais a beaucoup à nous apprendre.
TOO #50