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Derrière ce sentiment plus ou moins pathologique, se niche parfois un manque de confiance en soi ou une peur incontrôlée de l’abandon. La souffrance est telle que certains jaloux préfèrent mettre une croix sur leurs histoires sentimentales plutôt que de vivre dans cette angoisse. Il existe pourtant des processus pour sortir de ce cercle infernal. Zoom sur 7 étapes proposées par Bernard Geberowicz, thérapeute familial et auteur de « J’arrête d’être jaloux(se) » aux éditions Eyrolles. La jalousie est une source de stress, de panique, d’agressivité et de dévalorisation de soi qui peut pousser à isoler l’autre, le dénigrer, le surveiller, le menacer voire même le violenter dans les cas les plus extrêmes. L’objectif de la méthode de Bernard Geberowicz n’est pas d’éradiquer la jalousie (ce qui nécessiterait une véritable psychothérapie) mais de la modérer, l’apprivoiser et de la rendre un peu plus vivable, pour soi comme pour l’autre…
Comme pour les alcooliques ou les dépressifs, la première étape vers la guérison consiste à prendre conscience de son problème dans sa globalité. Non seulement à reconnaître sa jalousie, l’observer, l’identifier mais aussi à décrypter les ressentis et émotions qu’elle génère chez votre partenaire en vous mettant à sa place. Selon vous, l’amour de l’autre ne peut s’envisager que de manière exclusive. Or vous pensez que l’être aimé ne s’intéresse pas uniquement à vous et cette idée vous est intolérable. Votre jalousie n’est pas adaptée à la réa- lité car vos soupçons sont infondés mais vous perdez quand même le contrôle. Bernard Geberowicz vous propose de prendre un cahier et de décrire une journée catastrophe que votre jalousie a transformé en désastre. Est-ce que les soupçons à l’origine de votre jalousie étaient justifiés ? Pourquoi partez-vous du postulat que l’autre vous ment ? Observez la manière dont vous êtes entrée dans l’engrenage victime/ bourreau. Tout d’abord victime car vous vous sentiez à la merci de la trahison hypothétique de votre partenaire, vous êtes devenue bourreau en utilisant vos croyances irrationnelles pour malmener l’autre avec vos soupçons et vos reproches. La victime de cette situation est votre partenaire. Vous-même êtes victime… de vous-même ! Réagissez car sur le long terme, votre moitié risque de vous mépriser voire même de vous fournir de bonnes raisons d’être jalouse pour vous rendre la monnaie de votre pièce… Il est également déterminant d’identifier quand et comment ce sentiment se manifeste. La jalousie passe par le regard mais c’est l’interprétation et la représentation de ce que vous avez vu qui fausse votre jugement. Il y a égale- ment la double peur d’être ridicule en inventant ce que les autres vont penser de vous si vous êtes cocue et le jugement qu’ils auront si vous ne réagissez pas. Ce sont les conséquences ainsi imaginées de la situation fantasmée qui vont provoquer l’emballement des émotions et le déferlement de comportements toxiques.
L’expression physique et psychique de la jalousie est un indicateur précieux. Généralement, ce sentiment s’exprime à travers l’anxiété (impression d’un danger imminent) et la colère. Il est primordial d’apprendre à déceler les signes d’un dérapage en vous isolant. Essayez de revivre la fois où votre jalousie a provoqué une crise. Notez dans un cahier toutes les émotions qui vous submergent. Ne soyez pas dans le jugement, laissez juste libre cours à vos ressentis ! Réalisez enfin un exercice de relaxation pendant 5 minutes en inspirant 3 secondes par le nez puis en expirant 3 secondes par la bouche et ainsi de suite. Concentrez-vous sur le soulèvement de votre cage thoracique et de votre ventre. Reprenez votre cahier et posez-vous la question suivante pour chaque ressenti inscrit : Pourquoi est-il survenu et qu’est-ce qu’il exprime ? Une fois détectée, l’émotion devient beaucoup plus facile à désamorcer.
Quand vous sentez la pression monter, Bernard Geberowicz propose d’aller promener le chien ou de faire un tour pour vous calmer et vous oxygéner. Apprenez à respirer profondément. Si votre suspicion est quasi quotidienne, acceptez de la considérer comme un trouble obsessionnel et de vous faire aider. Comme tous les dépendants, vous êtes responsable de vos actes mais pas coupable. La jalousie extrême est une possible réactivation de traumatismes antérieurs (généralement vécus dans l’enfance). Grâce à un thérapeute, vous pourrez ramener à la conscience ces situations anciennes, agir sur les émotions originelles et prendre conscience du fait que certaines peurs sont liées à des vécus qui n’ont plus lieu d’être. Les personnes jalouses ont souvent souffert de compétition entre leurs parents, de rivalité avec leur beau-père, leur belle-mère ou avec leurs frères et sœurs. La jalousie est la conséquence d’un manque de sécurité et d’une estime de soi déréglée ou dégradée.
Mettez-vous à la place de votre partenaire. Sortez de vos idées obsédantes et soyez à l’écoute de ce qu’il a à dire. Ainsi, vous lui faites voir que vous attachez de l’importance à ses ressentis et que vous voulez l’aider à vous aider. Vous lui montrez que vous êtes consciente de votre problème et de ce que vous lui faites endurer. Imaginez ce qui se passerait s’il était à votre place et vous à la sienne. Comment réagiriez- vous l’un et l’autre ? Il est primordial d’apprendre à communiquer pour comprendre vos besoins et ses désirs. Il est impératif de désamorcer l’escalade émotionnelle et d’être attentif l’un à l’autre en respectant quelques règles : écoutez pour apprendre et non pour reprocher, ne faites pas de suppositions, parlez à la première personne pour vous responsabiliser, ne vous perdez pas dans les remontrances, acceptez sa vision des choses et soyez indulgente avec vous-même car vous faites de votre mieux. Enfin, excusez-vous de vos comportements excessifs.
Quand vous vous sentez insécurisée, vous avez tendance à projeter toutes vos inquiétudes sur votre couple. Tous vos arguments commencent par « c’est parce qu’il me trompe que… » Vous interprétez les silences relationnels et ses absences comme un signe de mensonge et vous guettez les indices corroborant votre version fantasmée de la réalité. Une fois que vous avez identifié vos projections, acceptez de remettre en question vos certitudes. Identifiez la vraie source de votre mal-être plutôt que de croire une nouvelle fois que l’on vous trompe.
Si à contrario, vous pensez d’office que votre conjoint mérite votre confiance, vous ne ressentirez plus le besoin de surveiller son emploi du temps, ses sms et ses fréquentations. Vous devez accepter de lâcher prise sur tout ce qui ne dépend pas de vous directement et sur quoi vous n’avez aucune influence. Envisagez votre couple comme interdépendant et non fusionnel. Chacun doit cultiver son propre jardin (sa vie professionnelle, sociale et amicale) pour rayonner dans sa vie de couple.
Bernard Geberowicz propose d’utiliser l’exercice d’habituation permettant de rééduquer son cortex préfrontal. Choisissez des situations pouvant provoquer votre jalousie et travaillez sur 3 attitudes : la curiosité, la nuance et l’acceptation. Par exemple, si votre Jules arrive en retard, au lieu de vous dire immédiatement qu’il est en train de vous tromper avec une autre, vous vous direz : Pourquoi est-il en retard (curiosité basée sur des faits) ? Il n’est pas en train de me tromper, il doit être dans les embouteillages et il n’a plus de batterie sur son portable (hypothèse crédible et nuancée). Il est en retard et il n’a pas pu me téléphoner (acceptation). En vous entraînant, vous allez arriver à remplacer vos automatismes émotionnels par des pensées conscientes et raisonnées. En cas de croyances toxiques irrépressibles, demandez de l’aide à votre conjoint pour rééquilibrer le lien et rétablir la confiance. Expliquez-lui que vous avez passagèrement besoin d’être rassurée et qu’en ce sens vous aimeriez échanger et partager un moment avec lui. Vous verrez, ça marche !
TOO#23