Selon une étude scientifique longitudinale d’Harvard menée pendant 80 ans auprès de deux générations d’individus, les clés de l’accomplissement ne se trouvent évidemment pas dans les injonctions sociales. Elles sont là, à portée de main ! Suivez le guide…
L’étude de Harvard sur le développement des adultes est issue d’un protocole scientifique qui a été mené pendant plus de 80 ans auprès de 724 individus et leurs 1 300 descendants. Les docteurs Robert Waldinger, professeur de psychiatrie à la Harvard Business School, et Marc Schulz, professeur de psychologie au Bryn Mawr College, forment la quatrième équipe de direction en charge de cette étude. Dans leur livre The Good Life (devenu best-seller outre-Atlantique), ils décryptent les résultats de leur étude et partagent ses enseignements. Ils se sont focalisés sur le bien-être et la santé de l’être humain en associant des résultats médicaux, des trajectoires personnelles, des sagesses ancestrales et des outils concrets qui prouvent que le bonheur ne rime pas avec réussite et succès financier, mais surtout avec capacité de résilience, interactions de qualité, générosité dans l’être et sensation d’accomplissement. Aimer, être aimé et avoir la sensation d’avoir été utile à la société ou à ses proches nous rendraient bien plus heureux que la réussite financière et les titres ronflants. Mieux qu’une thérapie, ce livre sur la condition humaine universelle nous prouve que nous détenons les clés pour réussir notre vie. Une bouffée d’optimisme que vous aurez plaisir à dévorer sur la plage ! La belle vie à portée de main, en somme, et il n’est jamais trop tard pour en jouir pleinement.
En 2007, une enquête réalisée aux États-Unis portait sur les principaux objectifs des milléniaux : 73 % d’entre eux avaient répondu qu’ils voulaient devenir riches et 50 % qu’ils espéraient devenir célèbres. Dix ans après, les réponses des mêmes individus étaient bien différentes : ils ne voulaient plus connaître la célébrité, mais gagner de l’argent, réussir leur vie professionnelle et avoir payé leurs dettes. La société occidentale dans laquelle nous évoluons nous formate à juger le bonheur par la réussite professionnelle et l’argent. À peine savons-nous balbutier quelques mots que nous sommes questionnés sur notre métier à l’âge adulte, comme s’il définissait notre identité. La réussite dans la vie est jaugée sur le titre, le salaire et les réalisations professionnelles. Mais cela ne suffit pourtant pas à « mesurer » le bonheur d’une vie.
Comme le font remarquer les deux auteurs, la société nous bombarde d’injonctions sur ce qui nous rendra heureux et sur ce que nous devrions souhaiter dans l’existence. En outre, la vie magnifiée de nos relations et de nos amis sur les réseaux sociaux ne fait que renforcer le sentiment que nous sommes passés à côté de quelque chose, que nous ne sommes pas à leur hauteur et que le bonheur est hors de portée. Paradoxalement, une vie riche est une vie qui s’est façonnée, qui s’est forgée à travers les épreuves petites et grandes. À l’Antiquité, Aristote employait le mot Eudaimonia pour désigner un état de bien-être profond dans lequel une personne sent que son existence a un sens et un but. L’eudémonisme se différencie de l’hédonisme, qui s’apparente à une notion de bonheur éphémère. Ressentir un sentiment d’accomplissement à la fin de sa vie tiendrait finalement dans la sensation que notre vie méritait d’être vécue malgré les moments difficiles et les obstacles. La valeur que vous lui donnez à la fin du parcours est finalement le seul véritable indice de réussite…
Depuis le début de l’étude lancée en 1938, le but d’Harvard n’était pas de comprendre ce qui rendait les gens malades, mais bien au contraire pourquoi ils allaient bien. Cette étude longitudinale n’est pas rétrospective, mais prospective : elle ne fait pas appel à la mémoire de l’individu, mais se focalise sur ce qu’il vit à l’instant T. L’ensemble du protocole est un succès car il a su fidéliser ses participants pendant quatre-vingt-quatre ans avec un taux de participation, donc de fidélisation, de 84 %. Certains de ses participants sont suivis depuis 1941. Dans toutes les études longitudinales menées dans le monde, parmi les prédicteurs de la santé et du bonheur apparaissent toujours l’alimentation saine, l’exercice physique, le niveau de revenu, mais aussi la qualité des relations entretenues avec son conjoint, sa famille, ses amis et ses voisins. La santé, surtout en vieillissant, est directement corrélée avec les relations sociales. Le sentiment d’être connecté aux autres à 50 ans serait, d’après les résultats de Harvard, un gage de bonne santé à 80 ans.
A contrario, plus vous entretenez des situations conflictuelles, plus vous augmentez les risques de maladie et notamment de dépression. Ce n’est pas surprenant puisqu’une interaction positive déclenche un sentiment de sécurité et de bien-être, ce qui réduit notre excitation physique. Si les humains ont survécu à l’époque préhistorique, c’est qu’ils étaient des êtres sociaux qui savaient faire preuve de coopération. Ce besoin social est inscrit dans notre patrimoine génétique. On vivrait d’ailleurs mieux en apportant du bonheur aux autres, qu’en s’en prodiguant soi-même. Le travail n’a d’ailleurs véritablement de valeur que s’il est significatif pour les autres. Par ailleurs, on négligerait trop souvent les sources de bonheur qui se trouvent à portée de main au profit d’une présumée réussite sociale et professionnelle car on associe beaucoup trop souvent l’accomplissement à l’argent. Une étude menée dans un train dans une grande banlieue américaine a prouvé que les prédictions affectives étaient très souvent erronées et que nous minimisons toujours la portée positive d’une interaction avec autrui. Sous prétexte de se protéger des désagréments possibles liés aux côtés imprévisibles des relations, on s’empêcherait souvent de vivre le bonheur d’être connectés aux autres. De même, les jugements de valeurs et de pratiques inhérentes à chaque culture (dans laquelle nous avons baigné depuis notre naissance) jouent les trouble-fête et nous empêchent d’être l’animal social qui sommeille en nous.
L’argent, un moyen de survie mais pas un gage de bonheur
D’après l’étude Deaton et Kahneman sur la corrélation du bonheur et de l’argent, une fois qu’on a dépassé le seuil de pouvoir satisfaire nos besoins fondamentaux et d’avoir un sentiment de sécurité, l’argent semble peu important, voire pas du tout, pour atteindre le bonheur. Si chaque denier compte pour les revenus les plus bas car l’argent est synonyme de survie, de sécurité et de douleur émotionnelle lié au manque de contrôle, dès que l’on mène une vie vraiment confortable, l’argent devient une valeur plus abstraite qui se rapporte à la notion de statut et de fierté. S’il est un moyen pour atteindre ses objectifs personnels, c’est généralement que ces derniers ont un rapport au bonheur d’autrui. Si vous demandez à un homme de plus de 80 ans de quoi il est le plus fier, il y a de forte chance qu’il vous parle de sa famille et de la réussite de ses enfants plutôt que de la fortune qu’il a accumulée.
TOO #51
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